Affectionnant particulièrement les sous-bois sombres et humides, l’ail des ours (Allium ursinum) sort de terre à la fin de l’hiver. Issu de la famille des Liliacées, il fait bien partie intégrante du genre Allium au sein duquel on compte nos aulx cultivés (en particulier Allium sativum originaire de Chine). En revanche, aucun lien avec l’alliaire officinale (Alliaria officinalis qui est décrit dans cet article).




 

Identifier l’ail des ours : une odeur qui ne trompe pas

On préfère le ramasser avant floraison, il faut donc être vigilant sur l’identification des feuilles. Celles-ci sont ovales à nervures parallèles, se terminant en pointe et rattachées à la plante par un long pétiole qui s’élève du sol. Leur texture est généralement molle, rappelant un peu l’aspect d’un sachet plastique, une fois froissée ou déchirée, la feuille libère une forte odeur d’ail caractéristique. Les plants sont rarement isolés et on peut vite dénicher de véritables colonies dans les pelouses ombragées ou le long des cours d’eau, de quoi faire de belles récoltes.

L’ail des ours se trouve parfois en colonies importantes dans les milieux humides. ©Alban Cambe

La confusion avec des plantes toxiques, voire mortelles, comme le muguet (Convallaria majalis) ou la colchique d’automne (Colchicum autumnale) peut être facilement évitée. Les feuilles de muguet sont généralement imbriquées les unes dans les autres sans pétiole apparent tandis que les feuilles de colchique entourent un fruit en forme de capsule et ont un aspect allongé comme un ruban terminé en pointe. Le plus simple est de s’assurer que la feuille dégage bien une odeur d’ail nette et franche.

Les fleurs de l’ail des ours sont dressées et possèdent six pétales blanches. ©Alban Cambe

Attention aux plantes poussant au même endroit, à la même saison. Sans pour autant se ressembler, certaines feuilles toxiques pourraient se retrouver par mégarde dans notre récolte. L’arum tacheté (Arum maculatum) est ainsi potentiellement mortel et se retrouve parfois au même endroit que l’ail des ours.

Une feuille d’arum tacheté (toxique) en mélange avec des feuilles d’ail des ours. ©Alban Cambe

L’ail triquètre : un envahisseur délicieux

On pourrait également le confondre avec une espèce devenue invasive dans l’ouest de la France : l’ail triquètre (Allium triquetrum). Présentant des feuilles longues et fines, on reconnaît surtout cette espèce à sa hampe florale à section triangulaire, la floraison intervient pour les deux espèces à partir du mois d’avril. Là où les fleurs dressées de l’ail des ours sont formées de six pétales parfaitement blanches, l’ail triquètre présente des fleurs pendantes à pétales blanches où court une ligne verte dans la longueur. Attention à la confusion possible avec les jacinthes qui peuvent être toxiques. Là encore, fiez-vous à votre nez ! L’odeur d’ail est bien présente et il s’agit également d’une espèce comestible alors faites-vous plaisir !

L’ail et ses vertus médicinales

Les aulx ont acquis une solide réputation de plante médicinale, à juste titre. Leur odeur provient de composés riches en soufre, élément connu depuis l’antiquité pour ses propriétés antimicrobiennes (on l’utilisait alors pour traiter les vignes).

L’ail présente ainsi des vertus stimulantes et intéressantes pour lutter contre la plupart des infections de la sphère ORL (angines, bronchites, sinusites ou simple rhume), on le préférera alors cru en ajout régulier dans la ration alimentaire à raison d’une à deux griffes par personne et par prise, augmenter les doses lorsque les symptômes débutent.

Respectez la ressource en ne ramassant que ce que vous allez consommer… Il y a parfois de la marge ! ©Alban Cambe

Des paysans forts vigoureux du sud de la France (tout comme en Chine d’où provient l’ail cultivé) avaient pour habitude de le consommer chaque jour en le considérant comme un aliment autrement plus important que le pain quotidien, un véritable traitement de fond.

Enfin, les aulx et en particulier, l’ail des ours, sont également connus pour être d’excellents vermifuges. Deux écoles s’affrontent : celle qui préconise l’utilisation régulière ou ponctuellement majorée de l’ail par voie orale ; celle qui recommande plutôt de faire macérer 6 à 8 griffes écrasées dans une eau chaude jusqu’à ce que le liquide tiédisse, il faut ensuite l’administrer au patient par lavement… Tant que les pharmacies sont achalandées, peut-être est-il plus sage d’acheter quelques boîtes de « Fluvermal »…

Utilisations culinaires de l’ail des ours

Pour utiliser l’ail des ours ou l’ail triquètre en cuisine, les idées ne manquent pas ! Le plus simple est de laver soigneusement les feuilles puis de les écraser dans de l’huile d’olive pour obtenir une pâte homogène qu’il suffira de saler et poivrer pour venir y plonger des légumes crus en apéritif. On peut également broyer une poignée de feuilles avec 50 grammes de beurre demi-sel dans un mixer et l’ajouter aux escargots avant cuisson ou bien en tartiner de fines tranches de pain qui iront gratiner au four, du « garlic bread » anglosaxon version sauvage.

Dès la fin de l’hiver, les feuilles sortent de terre. ©Alban Cambe

L’ensemble de la plante étant comestible, les boutons floraux (au goût particulièrement piquant) peuvent être ajoutés aux salades tout comme les bulbes, les fleurs servent de décoration. Bulbes et boutons floraux peuvent être macérés dans du vinaigre blanc en bocal pendant 1 à 2 semaines pour réaliser des espèces de câpres à la saveur aillée.

Tubercules, feuilles, boutons floraux et fleurs sont utilisables, comestibles et médicinaux. ©Alban Cambe

Les aulx sont ainsi des plantes d’une grande valeur culinaire mais également omniprésentes dans la pharmacopée traditionnelle. Implémenter l’ail dans sa ration quotidienne est aisé et sera bénéfique tant en termes culinaires que du point de vue de la santé. Attention cependant à ses effets secondaires peu attirants : renvois et haleine fétide. À éviter avant d’aller retrouver votre moitié. Quoique, si tout le monde mangeait de l’ail, personne n’y ferait attention !

Une recette de pistou à l’ail des ours

  • 100 g de feuilles d’ail des ours et/ou d’ail triquètre
  • 50 g de poudre d’amandes (le double pour la version « paléo »)
  • 50 g de parmesan râpé (rien pour la version « paléo »)
  • 1 demi cuillère à café de sel
  • 1 cuillère de poivre du moulin
  • Des noix et/ou des pignons de pin écrasés
  • Huile d’olive (jusqu’à ce que la consistance vous convienne)
  1. Au mixer, hacher rapidement les feuilles d’ail avec la moitié de la poudre d’amande et deux cuillères à soupe d’huile.
  2. Terminer en ajoutant le reste des ingrédients dans le mixer ou (de préférence) broyer le reste des ingrédients dans un mortier avec les feuilles d’ail en incorporant l’huile petit à petit.
  3. Arrêter lorsque le pistou a une consistance pâteuse homogène.
  4. Servir en accompagnement de pâtes ou sur de fines tartines de pain grillé.

Attention également à rester prudent durant la cueillette et éviter les plantes poussant en bord de route ou susceptibles d’avoir été contaminées par des excréments animaux vecteurs de parasites. La meilleur solution reste alors la cuisson. On notera enfin que cette plante est très facile à propager, il suffit d’en récolter quelques individus et de les planter dans son jardin pour avoir sa propre réserve en conditions contrôlées.




Alban Cambe

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